« Je dis aux jeunes : ne cherchez plus un patron, cherchez des clients. » (E. Macron)
Nous, on vous dit une fois de plus : bravo M. Macron. On se demande parfois quelle est la muse inspiratrice de vos saillies ? Par quel angle analyser les propos déraisonnables que vous tenez à longueur de déclarations ? Plus personne ne doute de votre ego boursoufflé. Nous sommes nombreux et conscients de vos supercheries philosophiques, ainsi que de la confusion dont vous semblez parfois atteint. Tout cela pourrait dépendre d’une consultation suivie ou non d’un cortège pharmaceutique léger.
Mais il se trouve que vous avez un pouvoir immense, bien trop grand d’ailleurs. Ces troubles en toutes autres circonstances devraient rester dans la sphère privée, mais compte-tenu de votre position ils deviennent nécessairement publics. Voilà la raison pour laquelle nous continuons à vous apporter la contradiction et à débusquer les énormités de vos « pensées complexes ».
Sans trahir la « pensée complexe » du suzerain, M. Macron engage les jeunes à devenir des patrons, des gens responsables de leur futur qui comprennent enfin le système libéral source de tous les bonheurs. M. Macron engageait déjà les jeunes à nourrir l’envie de devenir milliardaires tout en prétendant que les britanniques avaient eu la chance d’avoir Mme Thatcher aux commandes de l’État. Rien de moins.
Macron, vos réformes du travail vont de facto rendre les futurs travailleurs patrons malgré eux, à la recherche de clients qui seront leur patron. Le système que vous défendez n’est plus à une contradiction près. Les grosses entreprises deviennent des trusts d’activités qui se rachètent les unes les autres pour produire toujours plus et être toujours plus « compétitives ». Oui, M. Macron vous connaissez la « compétitivité ». Ce concept fabuleux que les entreprises invoquent comme une fatalité du marché pour mettre des salariés à la rue. Vous avez d’ailleurs tellement bien compris la « compétitivité » que vos ordonnances leur permettront de les jeter encore plus salement dehors.
Il ne faudrait pas oublier les dividendes versés aux actionnaires masqués pudiquement par la « compétitivité ». Que le marché s’organise et que le darwinisme sauvage règle la vie et la mort des salariés ! Vous savez M. Macron que les grandes entreprises s’engagent en début d’année fiscale à verser une quantité de dividendes à ses actionnaires ? Savez-vous que si elles n’atteignent pas leurs objectifs de rentabilité elles empruntent auprès des banques afin d’honorer le versement des dividendes ?
Savez-vous que dans le même temps les salariés font les frais de ces politiques délétères avec des augmentations réduites à des peaux de chagrin convergeant bien souvent vers zéro ? Pire, la loi du marché que vous défendez les rend coupables et les jettent dans la précarité de Pôle Emploi.
Dans de nombreuses entreprises aujourd’hui tout est organisé pour que les salariés soient en compétition les uns avec les autres afin de préserver la « compétitivité » de l’entreprise. Le travail coopératif, l’entraide sont des valeurs tombées en désuétude. Il faut être « com-pé-ti-tifs », il faut être un « winner ».
Il faut toujours plus de clients, plus de prises de commandes, plus de facturations, moins d’investissements en recherche et développement, plus de détournements d’argent de l’État, moins de charges (il n’est plus de mise de parler de « cotisations » patronales mais de « charges » patronales), il faut des salariés investis, flexibles et adaptables.
Devant la raréfaction du travail pour tous dans le cadre de ce que vous dictez comme politique, les salariés deviennent des objets de production. L’organisation du travail devient insoutenable, tant dans sa nature que dans sa forme. Vous accablez les salariés mais c’est le travail qui est malade M. Macron.
L’organisation qui se profile, facilitée par vos réformes du travail : ce sont des travailleurs indépendants, sans contrats pérennes, embauchés pour la durée d’un projet et jetés ensuite à la rue à la recherche d’un nouveau contrat précaire. Vous n’avez jamais vu M. Macron ces images d’archives de l’entre-deux guerres, où on découvre ces travailleurs victimes des errements d’une finance folle, le matin à la porte des usines attendant qu’un doigt bienfaiteur les désigne pour effectuer quelques heures de travail ? La recherche d’un client-patron M. Macron s’accompagnera inévitablement d’un moins-disant salarial. Ces jeunes, M. Macron seront alors en compétition pour vendre le moins cher leur force de travail afin que la plus-value de leurs « clients » soit la plus importante possible.
Vous essayez de nous faire croire en un monde meilleur où chaque jeune, nouvellement converti aux idées macronesques, serait un patron heureux et prolifique.
La vérité M. Macron, c’est qu’en effet ces jeunes seront réduits dans votre monde à un état de servilité totale à leurs « clients » qui ne seront autres que leur patron.
Vous connaissez M. Macron la réalité des « jeunes pousses » ou « startups » ? Ce sont des journées interminables, des semaines aux horaires pléthoriques. In fine ? La plupart meurent parce que pas assez « compétitives ». Celles qui réussissent sont pour la plupart rachetées par de grands groupes industriels qui bénéficient ainsi d’avancées technologiques à bon compte.
Si l’histoire ne se répète pas M. Macron, elle balbutie. Il se trouve que nous, travailleurs et générateurs de richesses, nous ne sommes pas ignorants des malheurs historiques que votre politique a générés. Derrière vos discours lénifiants, se cache une réalité dont nous ne sommes pas dupes. Les jeunes M. Macron, sont aujourd’hui tellement dégoutés par le monde que vous incarnez qu’ils se détournent du modèle que vous leur proposez. Ils inventent de plus en plus de nouveaux modèles basés sur l’égalité dans l’entreprise, sur le partage et sur le temps libre. Le modèle d’esclavage que vous proposez ne trompe plus que les alouettes de votre parterre de croyants.
Vous pourrez peut-être tromper tout le monde quelque temps, le temps d’un malentendu historique, celui d’un second tour d’élection face à Mme Le Pen que vous avez vous-même organisé. Vous pourrez tromper quelques-uns tout le temps, le troupeau aveugle de votre porcherie législative. Un fait reste certain, vous ne tromperez pas tout le monde tout le temps, et votre arrogance dont vos délires et votre confusion sont le prolongement ne trompent pas. Votre aménagement modernisé de la politique des maîtres de forge n’a pas l’heur de nous séduire M. Macron.
Il va falloir encore une fois revoir votre copie, les jeunes vous y engagent.