Perle macronesque 18

Emmanuel Macron à Davos déclarait qu’il voulait que le taux d’heures supplémentaires majorées descende à 0 % et donc acter la suppression de la notion d’heures supplémentaires.

« Pour chaque heure supplémentaire », avait-il déclaré, « on doit pouvoir aller plus loin ». « Si vous pouvez négocier des accords majoritaires au niveau de l’entreprise pour n’avoir presque aucune surcompensation, cela veut dire que vous pouvez créer plus de flexibilité. »

Le suzerain dispose donc de ses gens.

… Que les bourgeois s’enrichissent et que le peuple travaille ! À l’ouvrage il pensera moins et les gueux seront moins enclins à disposer de leur liberté dont ils font si mauvais usage ; des fouteurs de bordel, des cyniques, des extrémistes, des fainéants.

Une bête aura moins d’inclination à la sauvagerie, si on l’occupe sous le joug du labeur.

Et puis que diable la destinée du peuple n’est-elle pas de se réaliser dans le travail ?

Quant aux savoirs, bigre ils en sauront bien assez pour assurer leur pitance. Le peuple est laid, ses enfants sont à son image, le mieux qui puisse leur arriver est bien de rentrer à notre service…

Si d’aventure, on en doutait, M. Macron a des idées précises sur l’évolution du travail et les rémunérations. Ainsi, il ne cache pas sa volonté d’abolir la majoration des heures supplémentaires.

Quand il déclare cette hérésie à Davos, M. Macron n’est pas encore président de la République.

Il n’est pas innocent qu’il ait proféré cette annonce à Davos, lieu consacré de la réunion de tous les plus grands voyous du monde. En lançant cet anathème M. Macron s’est forgé une solide réputation de voyou associé, et s’est ainsi attaché le support de la finance internationale en commettant le « crime initiatique ». Pour entrer dans les arcanes de ces institutions malveillantes pour les populations mondiales, il faut montrer volontairement son allégeance à la doxa ultra-libérale en perpétrant des actions pernicieuses contre les travailleurs.

En participant activement à l’œuvre du « talon de fer » qui écrase les peuples, M. Macron s’est forgé un viatique vers l’investiture suprême de cette République en décomposition. Le sacre de cette âme crasseuse n’en est que plus pitoyable.

Macron l’a compris de longue date, et instruit par ses mentors du MEDEF de l’aile libérale de ce qui restait du PS moribond, il n’aura pas hésité à montrer sa soumission aux ogres de la finance.

Cette initiative adossée à ses ordonnances déconstruisant le droit du travail trouve un écho historique. Nous allons vous rappeler en quelques lignes, M. Macron, l’évolution de la durée du travail. Encore une fois, les faits sont têtus et la logique de l’Histoire, bien que vous en affichiez un déni permanent, va vous ramener à l’évidence du réel.

En 1830 les ouvriers travaillaient de 16 à 18 heures par jour. Les rapports de santé publique sont accablants et font état de la grande détresse physique des travailleurs. La mortalité chez les femmes et les enfants est extrêmement importante et l’espérance de vie n’excède pas 45 ans.

Il faudra attendre 1848 et les révolutions européennes pour que le temps de travail passe à 12 heures quotidiennes. Évidemment, le Second Empire mettra fin à cet acquis. Il n’est pas inutile de rappeler qu’à chaque avancée sociale, le patronat s’est arc-bouté sur ses principes d’exploitation des salariés. Les réactions du patronat, face aux victoires populaires, sont toujours d’une extrême violence. L’historien P. Pierrard rapporte ces propos tenus par un patron du textile à l’adresse d’un inspecteur des fabriques : « La science économique veut que l’homme, dut-il y périr, doit toujours suivre le rythme de la machine qui, elle-même, pour assurer la prospérité, ne doit jamais s’arrêter. ».

Les premières revendications de 8 heures de travail journalier naissent en 1864 avec la première Internationale.

Il faudra attendre 1936 et le Front Populaire pour instituer les 40 heures hebdomadaires, avec encore les inévitables réactions patronales. Le patronat s’organise en réaction en Confédération Générale du Patronat, ancêtre du CNPF (dont l’un des dirigeants fut l’ineffable Yvon Gattaz, géniteur de Pierre du même nom) qui enfanta sous l’impulsion de l’héritier des maîtres de forge, Ernest Antoine Seillière, de l’actuel MEDEF.

La désagrégation du Front Populaire et la montée des pestes brunes en Europe et en France (auxquelles participa activement le patronat) entraîne la réinstauration des semaines de 60 heures de travail. Le Conseil National de la Résistance, au sortir de la guerre, abrogera les textes de Vichy et réactualisera la semaine de 40 heures.

Les événements de mai 1968 et les accords de Grenelle auront permis des avancées significatives au niveau des salaires et des congés payés. M. Macron lors d’une de ses saillies désormais légendaires prétendait que « les salariés pouvaient travailler plus pour gagner autant », les accords de Grenelle ont démontré le contraire, les salariés ont gagné plus pour travailler autant.

Il faudra attendre 2002 pour voir la mise en place des 35 heures qui depuis n’ont cessé d’être le cheval de bataille du patronat.

Le patronat n’a jamais cessé de tirer la sonnette d’alarme d’une économie qui allait péricliter à chaque réduction du temps de travail. Il est singulier de constater qu’elle ne s’est jamais aussi bien portée pour les tenants du capital.

Par ailleurs, M. Macron savez-vous que M. Seillière, patron du MEDEF, est un héritier des Seillière qui ont fait fortune sous la révolution de 1789 en spéculant sur le tissu ?

Ces banquiers et industriels du textile ont vendu à prix d’or des étoffes aux armées de la République en guerre opposées aux contre-révolutions à nos frontières.

Votre DRH en chef Mme Pénicaud et vous-même voudriez nous faire croire que par le saint esprit d’un patronat vertueux porté par la grâce de l’empathie il s’agirait désormais de trouver des accords dans les entreprises pour administrer le bien-être des salariés.

Ce patronat M. Macron est l’héritier d’une longue lignée d’individus peu recommandables qui n’ont fait que combattre les travailleurs. Un patronat qui, au cours de l’Histoire depuis 1789, s’est compromis dans les heures les plus sombres. Seillière, Gattaz et les autres n’ont qu’un objectif : asservir les travailleurs à la croissance de leur fortune. Vous n’êtes qu’un petit valet fantoche qu’ils ont mis en place pour servir leur appétit insatiable.

Savez-vous, M. Macron, qu’en près de 60 ans, la durée du travail a baissé d’environ 25 % sur un panel de dix pays ayant un PIB par habitant parmi les plus élevés. Si l’Histoire a une direction, elle a aussi un sens, celui du progrès social qui malgré vos attaques permanentes résiste à cette logique. Ce sens est le fruit des combats des travailleurs et non pas le bon vouloir d’un patronat qui aurait été touché par une grâce quelconque.

Votre jeunesse dans la fonction présidentielle, que votre parterre d’aficionados décérébrés loue comme une précocité confinant au génie, apparaît en réalité comme l’œuvre de ceux qui vous ont fait : le patronat séculaire et son enfant incarné par le pouvoir financier, rien de plus. Ils vous ont choisi pour votre médiocrité et votre ego boursouflé comme artisan des basses œuvres.

Mais la régression sociale à laquelle vous œuvrez ne se négocie pas, elle se combat.

Et nous, le peuple dépositaire des avancées sociales de nos prédécesseurs, continuerons la lutte contre les injustices auxquelles vos patrons aspirent.

Le suzerain n’est en fait que le vassal de ces truands historiques.