LE PLUS BEAU CADEAU DE NOËL : LA CATASTROPHE INÉVITABLE

LE PLUS BEAU CADEAU DE NOËL : LA CATASTROPHE INÉVITABLE

Jacques Fradin

Paru dans lundimatin 316, le 6 décembre 2021
Jacques Fradin Économiste anti-économique, mathématicien en guerre contre l’évaluation, Jacques Fradin mène depuis 40 ans un minutieux travail de généalogie du capitalisme.

 

Tout le monde connaît bien ce dicton russe de l’ère soviétique : plus c’est catastrophique, plus il faut se tordre de rire.
Il ne va donc pas manquer d’occasions de mourir de rire.

Ici je voudrais m’opposer au « catastrophisme éclairé ». Cette doctrine qui prétend que l’annonce de la catastrophe (écologique ou virale, ce qui revient au même) aurait le pouvoir d’empêcher la catastrophe (le grand dénouement du théâtre humain). Et serait capable d’empêcher la catastrophe annoncée (retourner le retournement) par un sursaut « de conscience », par l’éveil (le fameux woke, l’awakening), ou à la manière Jéricho des idées qui font tomber les murailles psychiques, de l’éveil au dessillement.

 

Bien entendu, et comme de coutume, aucune annonce, aussi terrible ou merveilleuse soit-elle, n’a cette capacité magique de transformer ou retourner ce que je nommerai (gentiment) « les habitudes », les manières habituelles, locales ou autochtones, de sentir ; moins affablement : l’enkystement apeuré dans un mode de vie.
Peut-être que la foi a, dans des temps mythiques, renversé des montagnes ; mais nous sommes, depuis longtemps, entrés dans un monde sinistre et cynique, celui de l’efficacité matérielle (avec ses services spéciaux).


Seule une révolution égalitariste, une catastrophe au sens théâtral (voir la fameuse théorie mathématique des catastrophes, avec ses point de rebroussement), aurait cette capacité de retourner le mode de vie dominant (relire le Docteur Jivago).
Seule une catastrophe politique pourrait empêcher la catastrophe (des catastrophistes).
Seul un désastre (« dés-astre ») politique peut contenir le désastre (la destruction) écologique.
Seule une catastrophe politique, avec son désastre sublime, bien qu’obscur, peut arrêter la catastrophe rampante que représente le développement universel de l’économie, du capitalisme, de l’industrie, aujourd’hui des innovations géo-écologiques miraculeuses, ah, les magnifiques batteries !
Dans une de ses mutations, si ce n’est dès l’origine (invoquons les Écossais, qui nous poursuivrons, de David Hume à Adam Smith et à toutes les mains armées de l’impérialisme britannique – Adam Smith le mercantiliste camouflé ou le physiocrate du Despotisme de la Chine, l’agent de la Compagnie des Indes), donc dans une de ses innovations, le capitalisme s’est emparé, par la force, les larmes et le sang, du grand espoir paysan, le désir de vivre une vie comme celle que menaient les seigneurs (à grand train), l’enrichissement pour tous, quitter les masures pour les palais, avec toutes les commodités (les « commodities » de Hume) ou le luxe popularisé, la chasse et les bains (et les stations thermales nobles), les voyages et les fêtes.

C’est ce rêve moteur, récupéré, être à l’abri du besoin, être à l’aise, devenir aisé, posséder une grande maison et tout le confort, avec toutes les facilités, y compris les nouveaux domestiques coloniaux (pourquoi tant d’Écossais dans le Raj britannique ?), c’est ce désir capturé qui a fini par pousser l’humanité souffrante dans le lit des capitalistes (une sorte de prouesse sexuelle). Que souhaitaient les habitants de l’ex bloc soviétique, derrière le mur ? Non pas la liberté, mais la consommation et la circulation des camions… Et de nouveaux murs – de ce point de vue des « nouveaux convertis », au capitalisme et au nationalisme, bien regarder la figure acharnée de la nouvelle ministre de l’intérieur britannique, Priti Patel, le symbole absolu de l’émigré intégré de seconde génération, née à Londres de l’émigration indienne, qui ferme férocement la porte au nez des nouveaux arrivants).


Pourquoi les misérables du monde, les paysans pauvres, risqueraient-ils leur vie ? Qu’est-ce que cette immense migration paysanne ? Un nouvel exode paysan (en deux étapes) à l’échelle planétaire ; les exilés fuyant les satrapies locales (et leur corruption) pour trouver l’enfer raciste des métropoles impériales déclassées (avec leur corruption) ; qui ne peut voir l’ironie de la fuite des Afghans (« collabos ») voulant rejoindre la ruine britannique et ses vapeurs de ressentiment (combien de nouveaux harkis ?).


Le modèle européen fantasmé se dupliquant en jeux de miroirs trop flatteurs.
L’imaginaire de la richesse, capitaliste, industrielle, technique, s’imposant. L’affolement consumériste, avec ses smartphones et ses voyages transcontinentaux, ses black weeks, cette panique étant propagée par toutes les voies (et voix), comme un virus (le consumérisme étant, du reste, la source ultime des épidémies, biologiques et mentales).

 

Ici je rappellerai un souvenir personnel, une fois n’est pas coutume.
Installé à l’ENS Lyon, il y a déjà fort longtemps (à l’époque ENSLSH, sciences humaines !), le directeur de l’École m’avait délégué « le soin » de recevoir les correspondants chinois de l’ENS de Shanghai et de les cornaquer (à Lyon) durant une semaine.
Pour préparer leur séjour, j’avais demandé aux enseignants (du supérieur en « sciences humaines ») chinois d’établir une sorte de liste de ce qu’ils aimeraient voir ou faire, étant donné que Lyon n’est pas Paris (pas de Bergères en Folies).


Du reste, pour ces invités chinois, Lyon était une ville industrielle célèbre, Berliet-Mérieux, le P4 de Normale Sup, la soie, etc. Surtout le P4 qui fascine tant les Chinois !
Mes amis chinois n’imaginaient pas du tout (mais pas du tout) que Lyon était (aussi) le siège du journal de La Décroissance. Et la vision surréaliste d’un bobo écolo des pentes déplaçant son frigo à vélo les auraient sans doute bien amusés (enfin de l’exotisme : le retour des coolies ou des Viets insurgés !)


Quelle ne fut donc pas ma stupéfaction en lisant la liste de leurs souhaits :
(1) Visiter les installations techniques du tramway (qui venait de se développer à Lyon) ;
(2) Étudier et comprendre le plan de circulation automobile de la ville (tunnels, rocades, périphériques, etc.) et, ébahissement, rencontrer les représentants des entreprises du BTP s’occupant de la construction des parkings (aériens ou souterrains) de centre-ville – mes chinois « lettrés » étaient intéressés, par-dessus tout, par le parking hélicoïdal des Halles de Lyon, dont ils avaient vu la présentation hagiographique sur internet ;
(3) Enfin, touche d’exotisme (pour les chinois), visiter la basilique Notre Dame de Fourvière (et son point de vue sur « les crayons », les hautes tours de la Part Dieu) et, si possible, rencontrer des représentants des missions catholiques en Chine, missions dont le siège était à Lyon.
On retrouve la fascination, bien connue, des soviétiques pour les techniques et les ingénieurs.
Fascination forgée par la guerre, et toutes les guerres à venir.
Un mouvement écologiste qui ne peut s’affronter à la question prioritaire de la guerre est, bien sûr, hors sujet : c’est la préparation de la guerre (nouvelle catastrophe inévitable) qui rend indifférent aux problèmes écologiques (combien de carburant consomment des meutes d’hélicoptères de combat, pour ne parler que de cela ?).
L’obsession (la paranoïa) soviétique stalinienne pour l’industrie lourde et le développement industriel (au prix d’un désastre humain innommable) était une obsession militaire : jamais il ne « nous », les soviétiques, il ne nous arriverait ce qui est arrivé à la Commune de Paris. Comment se défendre face à la prévisible attaque allemande ?
Telle est de nouveau l’obsession chinoise, face aux Américains (ces nouveaux Allemands).
Mimétisme de la catastrophe.
Être écologiste, c’est d’abord réclamer le désarmement unilatéral (l’auto-destruction des ex puissances impérialistes). Encore du Girard !
Inutile d’imaginer que la Chine, ou l’Inde ou n’importe quelle contrée « émergente », serait le signal indicateur d’une sortie hors de la voie désastreuse européenne. Tous les mystères post-coloniaux concentrés se retrouvent.

Maintenant, « la modernité européenne », capitaliste industrielle consumériste (avec ses hordes de touristes), s’est déplacée en Chine ou en Inde (ces pays étant les élèves parfaits du despotisme économique que l’Europe a enseigné). Et, ainsi, a colonisé irréversiblement des milliards de personnes.
Triomphe de l’impérialisme, américain, britannique, français, etc., qui laisse sur le carreau (des mines abandonnées) ces anciennes nations coloniales, l’élève, chinois ou indien, surpassant le maître. Le conflit sino-américain étant un retour classique aux guerres impérialistes du 19e siècle.
Passe encore une Europe à 300 millions d’habitants ; beaucoup moins vers 1900, lorsque la minuscule Grande Bretagne, avec ses colonies internes (Irlande, Pays de Galle, Écosse), était à la tête d’un empire colonial gigantesque (où déplacer les colonisés de l’intérieur).
Et voilà le rêve !

Comme richesse et puissance sont deux sœurs siamoises, le rêve européen colonial (de la colonisation économique) conduit inévitablement à la guerre (relire les classiques de l’impérialisme). Et, donc, au plus profond mépris pour les contraintes écologiques, sans parler des autres !
Lorsque l’Europe, disséminée par ses conquêtes militaires, devient un inframonde obnubilé par le consumérisme, un monde de 4 à 6 milliards d’habitants, totalement européanisé, se transforme en une bombe économique (et écologique).
La véritable catastrophe, la voilà : la colonisation spirituelle, le modèle européen.
Il revient donc aux Européens de prêcher la destruction de l’Europe.
La catastrophe pour empêcher la catastrophe.
À rebours des velléités revanchardes ou néocoloniales.

Arrivons alors au plat de résistance.
Comment penser cette fascination pour l’Europe (et construite par les guerres coloniales européennes : l’idée des conquérants est toujours l’idée juste) ?
Répondons en décalant, encore une fois, notre ennemi fétiche, Adam Smith. Et en revenant, toujours, à la grande controverse qui opposa deux Écossais, Adam Smith et James Steuart ; en n’oubliant jamais que les Écossais, vaincus et miséreux, ont été au cœur de la colonisation britannique.
L’Europe est le modèle d’une organisation politique « gagnante » : les idées justes sont celles qui réussissent, et l’Europe est le modèle de la réussite, de par ses victoires coloniales.
Ce modèle que je nomme despotisme économique (libéral autoritaire, pour reprendre les termes contemporains).
Un pouvoir autoritaire, encore plus aux colonies (mais n’oublions jamais la colonisation interne que représente l’économie), un pouvoir organisé par et pour l’économie (selon le schéma smithien de « l’infrastructure » nécessaire pour mener la guerre). Le schéma du despotisme d’entreprise, lui-même d’origine militaire (les bagnes industriels), étendu à la société entière et à la sphère politique en particulier.

Ce n’est pas d’aujourd’hui que date la collusion du public et du privé, qu’il y a une sorte de va et vient (revolving ways) entre les méthodes verticales des entreprises, la monarchie entrepreneuriale, le patronat, et l’autoritarisme bureaucratique de l’État. Napoléon Ier ou le bonapartisme étant le témoignage de cette fusion. N’oublions jamais que le Ier Empire était Physiocrate (libéral autoritaire). Et que Napoléon est un signifiant aussi fort que Hitler en matière politique : celui de la conquête (dût-elle se terminer en catastrophe).

L’Europe s’impose au monde par la conquête militaire ; et les États-Unis restent les dignes rejetons de cette histoire coloniale (gloire au presbytérien Woodrow Wilson, prix Nobel de la paix !).
Voilà ce qui fascine ; et suscite l’émulation (quand est-ce que les Chinois vont-ils vaincre les Américains ?).

Encore une fois, et comme le savait déjà Adam Smith (il a appris cela de son long séjour en France, Adam Smith le mercantiliste camouflé, et non pas le libéral à la sauce Hayek), une nation ne peut avoir de grande puissance militaire (et coloniale) que si elle est une grande puissance économique (indifférente aux enjeux écologiques). Toujours le modèle américain, avec puissance = richesse.
Le développement économique ou industriel (nucléaire, spatial, aéronautique, etc.) est donc une nécessité militaire (stratégique), qui ne souffre aucune discussion (d’ordre écologique ou social). La collusion public privé, sauce bonapartiste physiocrate, est un impératif militaire de puissance : faire la guerre, la préparer, voilà le régalien. Mais si Adam Smith a appris cela en France, c’est que depuis Louis XIV (le mercantilisme et le despotisme), le régime des « sociétés concessionnaires » a assuré à la France une suite de victoires militaires.
C’est cela qui fascine : le despotisme économique.

Le fameux despotisme de la Chine (des Physiocrates), c’est la théorisation du régime de l’économie triomphante, d’un régime bien français, puis européen. Celui des « concessions », le fameux PPP, avec sa division du travail entre l’infrastructure productive et ses dérivations militaires.

Pour comprendre la fascination qu’exerce l’Europe, il faut toujours revenir aux conquêtes coloniales ; et regarder l’Europe depuis son envers colonial.
Depuis les colonies (internes ou externes) l’Europe n’a jamais été « la patrie de la démocratie » ; et c’est cela, son despotisme économique armé, qui fascine.
Le consumérisme n’étant qu’un élément secondaire de la course aux armements.

Les écologistes se trompent complètement de cible, lorsqu’ils demandent un virage écologiste pour l’Europe. On ne peut être écologiste et européen : les deux termes sont antithétiques, autant que l’Europe est le nom du désastre du monde.

Penser depuis les colonies implique de dénoncer l’Europe comme le centre de gravité du despotisme ; exige de dénoncer cette croyance que « nous » serions, « nous » les athlètes de la démocratie, « libéraux » ; ou, que le libéralisme, économique et politique, aurait jamais existé.
Depuis toujours, le mercantilisme (celui qu’Adam Smith fustige pour cacher qu’il est mercantiliste) domine.
Et le mercantilisme est l’élément central du despotisme (relire alors Steuart plutôt que Smith).

Depuis les Physiocrates, et leur Royaume économique « laissé » aux concessionnaires, autant qu’ils défendent les intérêts du souverain (en Chine comme aux États-Unis), il est évident que la stabilisation du pouvoir politique passe par la croissance économique et la menue monnaie (« le ruissellement ») de la puissance militaire.
N’oublions jamais que ces Physiocrates sont les contemporains d’une grande révolution, révolution qu’ils ont appelé de tous leurs vœux.
Une pierre deux coups : (1) assurer l’infrastructure de la puissance militaire (l’infrastructure : Staline et l’industrie lourde, toute guerre est une guerre de matériel), (2) et comme produit dérivé (après quelques péripéties) promouvoir la richesse consumériste et l’acceptation libérale démocrate.

Voilà l’écueil écologiste : la production croissante des richesses (et du désastre écologique) est doublement nécessaire, pour la puissance à défendre, pour le consentement à obtenir.
Obtenir l’adhésion, le consentement : (1) grâce à la colonisation ou aux victoires militaires – ou en utilisant les défaites pour promouvoir un nationalisme revanchard, (2) en distribuant, style dames patronnesses, la menue monnaie de la production militaire et des conquêtes ; qu’est-ce que l’électricité nucléaire ? De Gaulle et l’industrie nucléaire, industrie d’abord pensée d’un point de vue militaire (d’où la suspicion hypocrite envers le nucléaire iranien ; il n’y a jamais eu, nulle part, de nucléaire « purement civil »).

L’Europe est donc le nom d’un système politique « efficient » qui, désormais, domine le monde : non pas la démocratie politique associée au libéralisme économique (cela n’est que de la propagande, un mensonge déconcertant), mais le despotisme économique mercantiliste.
Un système de tension militaire (et militarisé) accouplé au tourisme de masse (ce signe indubitable de l’enrichissement et de toutes les épidémies).
Un despotisme qui se rend acceptable par l’achat des clientèles électorales : le consumérisme.
Et c’est cette « efficience » militaire, ce qui fascine, qui rend le consumérisme, son produit dérivé ou son produit d’appel, doublement insurmontable, économiquement et politiquement.
Pour limiter la casse consumériste, il faudrait d’abord que l’Europe s’auto-détruise ou déconstruise radicalement toute son histoire coloniale et se rende à Calais en chemise, cul nu, la corde au cou. Il faudrait que l’Europe condamne en actes le modèle militaire qui la rend fascinante ; et ainsi maintient les feux du désastre planétaire.
L’écologie (surtout la libérale européenne) n’a aucune chance géopolitique.
Les Chinois ont bien compris la leçon européenne (et ruminent la chute soviétique). Et il faudrait bien plus que s’excuser des guerres coloniales menées pour la « libéralisation » du commerce (la reine Victoria étant le plus grand trafiquant de drogue que l’histoire ait jamais connu).
Comprendre que la catastrophe est inévitable implique de rejeter quelques idées reçues : celle de la démocratie, où « nous » habiterions, celle du libéralisme économique (toujours penser que le mercantilisme n’a jamais cessé et doit toujours être associé au bonapartisme), celle de la bienfaisance du capitalisme qui œuvrerait à enrichir les masses (bien après l’enrichissement outrancier des oligarques des concessions).

Le combat écologiste doit d’abord être le combat pour la destruction de l’Europe et pour une voie désastreuse de pauvreté. Désarmement économique unilatéral.
Le combat écologique n’a rien d’écologique au sens ordinaire (du capitalisme verdi).
Ce qui doit être visé est l’imaginaire de l’enrichissement, toujours lié au sentiment de puissance et aux échos coloniaux.
Mais comme cet imaginaire de l’enrichissement, la liberté de circulation automobile ou du transport aérien, les vacances coloniales dans les enfers tropicaux, est stabilisant, la dictature est acceptée autant qu’elle permet à tous de « se sentir à l’aise », l’aisance plutôt que la liberté, il est simple d’imaginer que les gouvernements du despotisme économique (européens, américains, chinois, indiens) n’abandonneront jamais la voie économique de la croissance.
Plutôt la catastrophe écologique future que la catastrophe politique immédiate (leçon gouvernementale du mouvement des Gilets Jaunes).
Et comme cette voie de la croissance est nécessaire pour maintenir sa place dans le grand jeu géopolitique (ainsi que nous l’avons dit en suivant le Smith mercantiliste : les républiques commerçantes sont aussi les puissances militaires dominantes), il est encore plus évident que l’écologie n’a aucune chance politique, sauf à devenir radicalement catastrophique (révolutionnaire).
Nous avons un cercle de renforcement : la croissance est nécessaire militairement, elle est nécessaire pour assurer la stabilité politique (assurer le pouvoir d’achat qui est la forme populaire du pouvoir politique), et tenir sa place dans le jeu des puissances du monde renforce la stabilité politique.
Plutôt qu’un éveil ou un éclairement, « le catastrophisme éclairé » produit une mithridatisation, l’écologie c’est une habitude de plus à prendre dans le cercle des contraintes despotiques (les anciennes contraintes n’étant nullement supprimées – comme l’énergie renouvelable qui ne fait que s’ajouter aux anciennes énergies, pour toujours plus de puissance).
Et l’annonce tonitruante de la catastrophe à venir (mais laquelle ?), maintenant clamée par tous les médias et participant au nouveau spectacle (avec son retrait), cette annonce fracassante apparaît comme un voile, comme un masque.

Un voile qui a pour objet de cacher la véritable catastrophe (la révolution ou la guerre).
De quelle catastrophe parlons-nous ? Révolution, retournement, dénouement.
Comment parler, sans rire, de « transition écologique », le complément de propagande de l’annonce catastrophiste, si, d’abord, les conditions politiques et sociales ne sont pas mises en cause ? Si le despotisme n’est pas dénoncé ?

Comment parler, sans étranglement, d’écologie, si la structure des pouvoirs et des richesse n’est pas renversée, « catastrophée ».
Certes les écologistes sont les nouveaux réformistes. Mais plus d’un siècle de réformisme (de trahisons, de collusions, de corruption – de négociations) devrait servir de leçon.
Inspirons-nous plutôt des dynamiques insurrectionnelles post-coloniales (internes, les Gilets Jaunes, ou extra-marines, la Guadeloupe) et voyons (le véritable éveil) que sous les protestations conjoncturelles (anti-vaccin, par exemple) couve le feu follet de la grande aspiration, celui de l’égalité sociale économique.
Toute, soi-disant, « transition écologique » qui ne serait pas D’ABORD une « transition » politique, un passage (sans doute forcé) vers la démocratie sociale, la fin de la république, la destruction du modèle entrepreneurial de la monarchie économique, ne serait qu’un nouveau mensonge, mensonge si bien exprimé par « Macron écologiste », le roi de la transition innovante.
Toute transition écologique, à régime politique constant ou à structure économique maintenue, n’est qu’une farce.
Farce qui peut porter le nom de Jadot.

L’écologie libérale (européenne) manière Jadot est une sinistre plaisanterie, pour conserver le régime des apparatchiks ou des politocards (tout changer pour que rien ne change).
Libéral écolo comme il y a eu libéral socialo.
Le nouveau pâté AU lapin, le pâté bobo À l’écolo.
Vive l’exposition universelle de Dubaï !

Jacques Fradin